ayamun  CyberRevue de littérature berbère

 

16ème année

 

Dernière mise à jour : vendredi 22 janvier 2016

 

 

Trois  nouveaux " anciens" prénoms vestiges, en voie de disparition :

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 Prénoms algériens authentiques

conseillés aux jeunes parents pour leurs enfants

et quelques faux prénoms à ne pas utiliser

 

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INTRODUCTION

Très souvent, pour bien individualiser leur enfant, la motivation de la plupart des parents est d'éviter à la fois un prénom trop répandu, et un prénom extravagant par sa rareté ou par sa signification.

 Le Dictionnaire Larousse définit ainsi le terme prénom : prénom, du latin praenomen, nom particulier joint au patronyme et qui distingue chacun des membres d’une même famille.

Au-delà de cette définition familiale apparemment innocente, dans la réalité, le prénom est au carrefour de la tectonique de forces sociétales, idéologiques, religieuses, politiques. Notre pays est au centre de puissances agissantes chaque jour un peu plus agressives : les arabo-baathistes veulent toujours plus d’arabisation, les intégro-islamistes toujours plus d’apparence, les évangélistes également ne perdent pas leur temps pour ajouter au désarroi des gens les plus fragiles. Les enfants se trouvent malgré eux être l’enjeu de ces luttes titanesques qui veulent toujours plus de « pureté ».  L’effet de mode n’est pas en reste : il joue un rôle majeur dans l’attribution des prénoms depuis quelques années, les séries égyptiennes n’y sont pas pour rien. La mode est éphémère mais le prénom, marqueur identitaire s’il en est, s’inscrit dans la pérennité même : la mode passe mais le prénom demeure !

Du fait de l’effet bulldozer de ces forces en apparence contradictoires mais complémentaires (car  ayant un but commun : la substitution purement et simplement de l’identité des générations à venir),  nous assistons depuis une vingtaine d’années, dans toute l’Algérie et particulièrement en Kabylie, à une véritable opération de destruction de notre réservoir de prénoms. Des prénoms spécifiques à notre pays sont entrain de disparaître : Mohand, Bouguerra, Leḥmer.

Le prénom a une puissance sociale sans comparaison : c'est un bien gratuit  de consommation obligatoire mais il n’est jamais anodin. S’il  ne coûte rien aux parents, en revanche il peut se révéler très coûteux pour celui qui devra le porter sa vie durant et parfois le léguer à ses descendants.

Normalement sa seule utilité objective ira dans le sens de l’intérêt de l’enfant. En France, il y a quelques années, un citoyen portant depuis des lustres, par sa généalogie, un nom homonyme d’une marque de voitures, voulait prénommer sa fille Mégane : ce prénom a été rejeté par la justice car contraire aux intérêts futurs de l’enfant. Dernièrement, toujours en France, quelqu’un voulait prénommer sa fille Canette, il a été heureusement débouté.

Avant l’indépendance de notre pays, le choix du prénom relevait des prérogatives de la famille élargie : les grands parents, mais aussi les oncles, les tantes, tous avaient leur mot à dire ; le père et la mère aussi. Ce consensus assurait une grande stabilité dans l’attribution des prénoms malgré une redondance certaine.

Depuis quelques années, avec le naufrage de la famille élargie, il arrive souvent que c’est à la salle de maternité où se déroule l’accouchement que se décide le prénom du nouveau-né, surtout quand il est de sexe féminin : devant le désarroi de l’accouchée, il arrive très fréquemment que la sage-femme de service attribue le prénom, souvent selon la série de TV vue la veille ; c’est ainsi que nous avons tous ces prénoms aberrants. Il est inutile de rappeler que les algériens souffrent d’une forme particulièrement sévère d’un syndrome universel, le syndrome de Yentl.

Dans tous les pays existe une liste des prénoms faisant généralement partie du patrimoine identitaire du pays. La gestion de cette base de données relève des prérogatives de l’Etat. On ne peut prénommer que dans de le cadre de cette liste officielle, sauf dérogation spécialement motivée. On ne peut pas prénommer son prénom comme on veut. Lui donner un prénom fantaisiste soi-disant « non typé » fera de cet enfant un futur déraciné, un herragua dans le prénom avant de l’être dans les faits.

Dans les mairies kabyles puisque ce sont celles que nous connaissons le mieux, mais le phénomène est national,  au nom d’une liberté « toxique » car pervertie, cette liste légale n’existe plus ou n’est plus pratiquée depuis des années. Laxisme, ignorance, dépersonnalisation ont trouvé un terreau fertile et prospèrent devant l’absence  de l’Etat.

  Les prénoms dits kabyles ou berbères ou algériens ou maghrébins qui circulent sur INTERNET et notamment sur Wikipedia sont faux pour la plupart. Quelles que soient les motivations des personnes qui diffusent ce genre de listes, ils contribuent à une chose : l’altération de la personnalité autochtone. Il s’agit dune véritable escroquerie culturelle.

De par la puissance de toutes ces forces supranationales en action, les algériens perdent chaque jour un peu plus leurs repères : ce qui faisait leur spécificité au milieu des autres êtres humains est entrain d’être gommé, faisant d’eux un peuple déprécié, dévalué à ses propres yeux, posant sur lui-même un regard ironique à l'occidentale ou à l’orientale. C’est selon.

Choisir pour leur enfant un prénom issu d'une civilisation dominante ou soi-disant prestigieuse signe le début du renoncement par les parents à leur culture d'origine, native.

              Nous allons, par l’intermédiaire de cette modeste page, tenter de placer un caillou dans les rouages de cette puissante et monstrueuse machine à broyer les prénoms, entre autres. Nous proposons par la même occasion une série de prénoms anciens, « démodés »  mais pouvant être revalorisés car portés par des personnalités faisant ce qu’il  nous reste de fierté.

Mohand Ouchaâlal

 

Voici le plan de cette page. Sur le Web, il suffit de cliquer sur le lien pour avoir la liste.

 

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I._ PRENOMS « classiques » 

 

II._ PRENOMS Specifiques à certaines régions arabophones

 

III._ Prénoms « historiques » :

 

IV. _OrigineS et détails des « Néo-prénoms » apparus récemment :

 

V._ PRENOMS INTRODUITS récemment :

1._ PRENOMS INTRODUITS récemment à partir du Moyen-Orient

2._ PRENOMS INTRODUITS récemment par les évangélistes

 

VI._ PRENOMS « fabriqués » récemment par « ignorance » et effet de mode:

VII._ PRENOMS  de fierté nationale

 

 VIII._ADDENDAS :    N°1 : Notre lecteur  se pénommant  INIG

                                  N°2 : Les prénoms berbères, de l'interdiction à la dérive, par Kouceila Zerguine

 

 

NB sur la transcription :   Ǧ = Dj, Ɛ = Â,  Ɣ=Gh, X=Kh, c=CH

 

 

 

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LISTES DES PRENOMS

 

I._ PRENOMS « classiques » 

 

Ces prénoms existent dans toute l’Algérie. Il existe quelques petites différences de transcription et de prononciation

 entre les régions berbérophones et arabophones.

 

 

 

Akli

Amezyan

Arezqi

Azwaw

Aεrab

Baya

Belqasem

Belεid

Btitra

Blal

Brahim Braham

Bujemεa

Busseεd

Busεid

Buzid

Buεlam

Cabḥa

Cafaε

Cafiεa

Caεban

Crif

Crifa

Ḍawiya

Dehbiya

Deḥman

Ḍrifa

Ɛebdelqader

Ɛacur

Ɛaziz

Ɛaziza

Ɛebdelḥalim

Ɛebdelkrim

Ɛebdella

Ɛebdelmajid

Ɛebdelmalek

Ɛebdelqader

Ɛebdelwahab

Ɛebdelεaziz

Ɛebdennur

Ɛebderaḥman, Ḥmanu

Ɛebderzaq

Ɛebdeslam

Ɛemran

Ɛetman

Ɛica

Ɛini

Ɛisa

Ɛli

Ɛmara

Ɛmer

Ɛmiruc

Ɛumar

Ɛziza

Faḍila

Faḍma

Faṭima

Fayza

Fazya

Ferawsa

Feṭṭa

Gana

Hacmi

Ḥakim

Ḥakima

Ḥalim

Ḥanafi

Haniya

Ḥasen

Ḥciya

Ḥend

Ḥesna

Ḥjila

Ḥlima

Ḥmana

Ḥmed

Ḥnifa

Ḥsen

Ḥuriya

Ḥusin

Idir

Idris

Jamal

Jamila

Jaziya

Jaεfer

Jejiga

Jida

Jilali

Juher

Juhra

Kamal

Karim

Karima

Kayes

Kaysa

Kella

Keltuma

Kuku

Latifa

Lehna

Leḥlu

Lewnis

Lexḍer

Leεmara

Lhadi

Lḥanafi

Lḥusin

Ljazira

Ljida

Ljuher

Lkayes

Lmajid

Lmeḥfuḍ

Lmextar

Lmuhub

Lmulud

 Luna

Lunǧa

Lunis

Lwennas

Lwiza

Lxamej

Lyaqut

Lεelja

Lεekri, Σekri

Lεerbi

Lεifa

 Madjid

Malek

Malḥa

Malika

Mbarek

Mbarka

Megduda

Tiuca

Tsuba (ţuba)

Meɣniya

Meḥfuḍ

Mekyusa

Melxir

Melεez

Mennac

Mennad

Mennana

Meqran

Meryem

Merzuq

Messeεd

Mestafa

Mesεud

Mesεuda

Mextar

Mezhura

Mezyan

Mḥemmed

Mḥend

Mhenna

Mhenni

Mnewwer

Mninuc

Muḥend

Muḥemmed

Mula

Muni

Murad

Musa

Myasa

Mεemmer

Nadiya

Nadya

Nafeε

Naser

Nasira

Newwara

Nura

Nurdin

Rabeḥ

Rabiε

Racid

Remḍan

Roza

Sadeq

Saleḥ

Salem

Saliḥa

Salim

Saluja

Samir

Samira

Samiya

Saci

Sassa

Saεdiya

Saεid

Saεida

Sedda

Sekkura

Sseεdi

Sɣir

Sɣira

Sliman

Smaεil

Smina

Sεid

Tameɛzuzt

Taɛacurt

Ṭaher

Taklit

Tariq

Taqemusit

Tasaεdit (Ɛdidi)

Ṭawes

Terki

Terkiya

Ṭeyyeb

Ṭiṭem

Tudert

Tunes

Utudert

Waεli

Werdiya

Wezna

Wiza

Wrida

Xaled

Xalfa

Xdija

Xelluja

Xlifa

Xlija

Yamina

Lyasmin

Yasmina

Yeḥya

Yesεed

Yeεqub

Yidir

Yunes

Yusef

Zahiya

Zakiya

Zalgum

Zayna

Zehwa

Zina

Zineb

Zubida

Zubir

Zuhra

Zulixa

Zwina

Zzhur

Ghaliya

Ghaniya

Ghenima

Tayidirt

Lunǧa

Taqemmusit

Latamen

Layetmas

Lɛekri

Luna

Latamen

Layetmas

Izem (Kabyles de Syrie)

Ruẓa

Terbeh

Mira

Hiba

Yakout

Betitra

(l)Akri(a)

Hesni

Tekfa

Tin-Hinan

Hemmama

Baâziz

Hadka

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

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II._ PRENOMS Specifiques à certaines régions arabophones

 

Même ces régions ne sont épargnées par cette vague destructrice. Des prénoms qui leur sont spécifiques sont entrain de disparaître. Ces prénoms en dehors des prénoms d’origine religieuse, sont traditionnellement dérivés  des couleurs, du temps qu’il fait, du jour de naissance dans la semaine. Outre les prénoms « classiques » énoncés ci-dessus, nous  citerons par

exemple : 

Leḥmer

Lezreg

Lekḥel

Rebɛi

Xemmisi

Ǧemɛi

Sebti,

   Buguerra

  Buras

     Lɛarem

 

  Les prénoms conjuratoires étaient donnés pour conjurer le mauvais sort, pour lutter contre le mauvais œil et la maladie. On pensait pour ainsi augmenter les chances de survie de l’enfant à une période où la mortalité infantile faisait des ravages. Nous citerons :

 

Zoulikha

Lɛifa

Lxamej

Lɛayachi

Barkahoum

Lmeṭeyyech(a)

Teyyucha

 

  Un prénom conjuratoire serait de nos jours mal vécu par l’enfant : Lxamej, Akli, Aberkan, Barkahoum, Layatmas, Zoulikha, Lekhel. Autrefois ces prénoms étaient portés avec fierté.

 

D’autres prénoms plus anodins sont en train de disparaître :

Bornia

Lmehri

Lgaher

Rebbah

Touhami

Lɛemri

Mahdjoub (a)

 

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III._ Prénoms historiques 

 

Yugariten

Masnsen

Aksil (Quseyla)

Yuba

Iferman

Geldun

Tin-hinan

Dihya

Kahina

Dassine

Takfarinas

Amastan

Ziri

Antalas

Gaya

Yeghmorasen

 

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IV. _Origine et détails des « Néo-prénoms » apparus récemment :

 

Yanis = Jean = John = Yaḥya

Ghilas = tigre

Salas = pilier

Amayas = léopard

Taninna = oiseau mythique

Tamilla

Tanina

Sedda = lionne

Yann = prénom celte (breton)

(t) Amazigh (t)

Tiziri = Lune

Imsis

 

 

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V._PRENOMS INTRODUITS récemment

 

Devant cette « déculturation » agressive, ils sont entrain de squatter tout notre espace, d’est en ouest, du nord au sud.

Des prénoms slaves (russes) introduits dans la 2ème moitié de XXème siècle ont déjà réussi leur « greffe ». Exemples : Nadia, Sonia, Lynda, etc. 3 iimedyaten-a tura dayen mmuzɣen !

 

 

1._ PRENOMS INTRODUITS récemment du Moyen-Orient :

Attention :

Culturellement et traditionnellement ces prénoms ne sont ni berbères ni algériens. Devant cette « déculturation » agressive, ils sont entrain de squatter tout notre espace, d’est en ouest, du nord au sud.

 

Raouf, Rayan (pour le garçon), Rayane (pour la fille), Racha (prénom afghan), Leyth, Sif-eddine, Yousra, Nour El Houda, Hidayette, Islam ,Mayssa, Samy, Anais, Walid, Bader, Marwa, Ibtisem, Adel, Nazim, Sana°, Kamelia, Ikram, Dounya, Chanez, Lyna, Aimed, Racim, Wassim, Nerrmine, Razane, Ishaq …

 

 

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2._ PRENOMS INTRODUITS récemment par les évangélistes 

 

Attention :

Culturellement et traditionnellement ces prénoms ne sont ni berbères ni algériens.

Maya, Abel, Kayan, Kristel, Ania, Yelenna, Alice, Alicia, Elissa, Malik, Neyla, Timmi, Laeticia, Dyna, Mayli(ze)

 

Pour nos compatriotes  de confession non musulmane, au lieu d’infliger à leur descendance des prénoms biscornus sans aucune âme, plus adaptés aux caniches qu’à de petits Algériens,  on pourrait proposer :

 

Nouh ( = Noé )

Ɛisa ( = Jésus )

Meriem(a) ( = Marie )

Yahya ( = Jean = Yanis )

Idris ( = Henoch)

Yaâqub ( = Jacob )

Haroun ( = Aaron )

Yousef ( = Joseph)

  Luqa ( = Luc ) 

        Bulus ( = Paulus = Paul)

Gelaz (Gelase)

 

Il  en existe  sûrement d’autres.

Les prénoms prestigieux  tels que  Augustin, Donat pourraient être utilisés. Gelaz (Gelase) est le pape « inventeur » de la fête de la Saint-Valentin.

 

 

 

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VI._ PRENOMS « fabriqués » récemment par « ignorance » et effet de mode :

 

Attention :     Ces prénoms sont faux. Ils ne sont ni berbères, ni algériens.

Afenṭazi, Cherine, Sérine, Sirina, Diana, Dyna, Dylane, Mayli(ze), Imsen, Melissa, Célia, Litisya, Laeticia, Ninda, Manyette,  Hora. Axel est un avatar de Aksil (Quceyla), Skander ( = Alexandre ?), Fady, Irine, etc., etc.

 

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VII._ PRENOMS  de fierté nationale  (héros de la GLN, artistes nationaux)

 

Ces prénoms « classiques »  sont valorisants. Il pourront l’être davantage si l’on rappelle qu’ils sont / ont été  portés par des personnalités, faisant notre fierté nationale. Des  héros de la guerre de libération nationale, des artistes, des écrivains ont été prénommés ainsi :

 

Hassiba

Amirouche

Abdelkader

 Lwennas

 Lounis

 Idir

 Belqasem

  Lɛerbi

 Ramdane

 Mustapha

 Mouloud

Muḥend-Aârab

 Yacine

  Waâli

  Hocine

  Ahmed

  Tahar

  Ali

  Ferhat

  Slimane

Saεid

  Mohamed

  Faḍma

 

  Muḥend-Ameẓyan

Cette liste n’est pas limitative ! Notre patrimoine « prénoms » est tellement riche. Il est aussi très fragile et victime de prédateurs !

 

On pourrait même y ajouter des prénoms tels que : Maurice (en Hommage à Maurice Audin) , Fernand ( en Hommage à Fernand Yveton, Pierre ( en hommage à Pierre Chaulet ) etc. Ils ont été nombreux à avoir donné ou consacré leur vie à leur pays.

 

  VIII. Addenda n°1 

 

Notre lecteur  se prénommant  INIG, d’après son courriel, nous fait parvenir les informations suivantes :

Timmi est un prénom chleuh (encore en usage)

 De plus, il y a quelques jolis prénoms féminins de Petite Kabylie hélas en voie de disparition : Mnana, Wedda, Zuba et Braham (les Touaregs appellent aberhem une personne ou un animal de couleur blanche avec des tâches < du verbe berhem).

Braham est cité ci-dessus (prénoms « classiques). Zuba est cité ci-dessus  sous la forme Tsuba ( ţuba )

Frawsa, Taqemusit, Lεekri (Σekri) sont des prénoms "vestiges" portés encore en Kabylie.

 

 

IX._Addenda n°2 

Les prénoms berbères, de l'interdiction à la dérive

par Kouceila Zerguine

 Si le télescope européen " Gaïa " a pu atteindre le 08 janvier 2014 son orbite opérationnelle dans l'espace, à quelque 1,5 million de kilomètres de la planète Terre, hélas, cette finalité n'a pas été la même pour le nouveau-né " Gaïa ", qui n'arrive toujours pas à trouver son chemin vers le registre de l'état civil de la commune de sa naissance à Arris, depuis le 30/07/2013

Et pour cause : les officiers de l'état civil continuent à faire la pluie et le beau temps, " Libre aux parents d'aller aux tribunaux ! ". Après la déclaration de l'officier de l'état civil de Arris (Batna), "… on n'inscrit pas des prénoms sans signification !", alors que la condition de " la signification " n'a jamais figurée dans l'article 64 du code de l'état civil. Nous assistons aujourd'hui à un énième ébahissement, une première dans l'histoire de l'identité nationale, puisque désormais donner des prénoms berbères aux nouveau-nés est contraire à la charia (L'islam). Cette " jurisprudence " n'est pas le fruit d'une fatwa émise par " un pseudo-mufti ", encore moins une plaisanterie pour distraire les esprits, mais plus précisément un des arguments avancé par la défense de l'APC de Arris (Batna) lors de l'affaire " Gaïa "- Tribunal administratif de Batna-. Selon ladite défense, qui a demandé en cette occasion de débouter la demande du demandeur (le père de Gaïa). Ce dernier voulait profiter de cet heureux évènement (la naissance de son premier fils) pour l'honorer d'un prénom amazigh de ses origines, de sa culture et de son histoire millénaires, celle de la Numidie. 

Les arguments soulevés par la défense trouvent en effet leur origine dans une autorisation accordée par le législateur algérien aux parents appartenant à une confession autre que l'islam, afin d'inscrire leur progéniture sous des prénoms en corrélation avec leur spécificité religieuse. L'Article 64 alinéa 2 du code de l'état civil prévoit clairement que :" Les prénoms doivent être de consonance algérienne ; il peut en être autrement pour les enfants nés de parents appartenant à une confession non musulmane ". Donc, cette dérogation ne concerne en aucun cas, bien évidement, les prénoms de consonance algérienne, plus précisément amazighs, du fait qu'ils répondent au premier critère, prévu par le même article, celui de " l'algérianité ", qui ne nécessite d'ailleurs pas même d'y revenir sur sa définition après l'amendement de la constitution de 1996(1). 

De même et selon toujours la logique de la défense de l'APC, les parents ne doivent pas être seulement de confession non musulmane, mais ils doivent également le prouver,"… le prénom de Gaïa est contraire à la charia… le père de l'enfant est un algérien musulman sauf s'il prouve le contraire ! … ". La charge d'apporter la preuve incombe alors aux parents ! Puisque selon ce raisonnement la définition de l'Algérien ou de l'algérianité est toujours à sa case de départ; donc définie comme telle : " arabo-musulmane ". 

Plus étrange dans l'analyse de cette prohibition (toujours selon la même défense) " …le père de l'enfant Gaïa n'a pas respecté les dispositions de charia El Islamia (l'islam) comme s'est pratiquée par le prophète … le récit du prophète Mahomet (QSSL) dit: " les meilleurs prénoms sont ceux avec lesquelles on adore et on loue". Bien que le Hadith (récit) n'est pas authentique, puisque le seul récit authentique sur ce sujet dit : " Les meilleurs des noms au regard d'Allâh (Dieu) sont `AbdAllâh et `Abd Ar-Rahmân "(2). 

Le critère prévu par l'article 64 du code de l'état civil doit donc (selon la défense de l'APC) céder sa place à la pratique héritée par le prophète, même si l'esprit dudit récit sur lequel la défense s'est basée n'interdit pas, mieux encore, il est cité - dans l'esprit du récit - à titre préférentiel ! Or l'islam n'est pas une source directe de la vie législative, mais plus exactement une source " subsidiaire du droit ". 

Selon l'article 01 Alinéa 02 du code civil : " En l'absence d'une disposition légale, le juge se prononce selon les principes du droit musulman et, à défaut, selon la coutume ", le même principe est prévu d'ailleurs par l'article 222 du code de la famille. En d'autres termes, la loi prime sur les matières rapportées, que ce soit auprès des instances judiciaires, qu'auprès des espaces institutionnels de l'Etat. Le cas contraire, " les principes du droit musulman ", devraient être comme tels : le raisonnement par analogie, le juste-milieu, et le rationnel, peuvent dans le cas récent servir comme une batterie de réserve. 

Dans le même ordre d'idées de ladite défense, et si on suppose bien que ces parents ont réussi à contourner cet article, il est probablement possible donc - selon cette logique - de revoir les décisions sur lesquelles les prénoms berbères ont été accordés, en raison que le fondement juridique sur laquelle la décision a été accordée, est frappée par l'illégalité, ce qui ouvre droit à l'APC en question de demander potentiellement son droit à l'abrogation de quelconques prénoms berbères. Entendu que toute violation aux dispositions de la charia, résulte le plus logiquement possible à une sanction sinon à une " repentance ". Il aurait été donc souhaitable pour ladite défense de se prononcer également sur la nature de la sanction! 

Quand le religieux prime sur le juridique !«Pêle-mêle» 

Les arguments soulevés par la défense de l'APC de Arris nous rappel bien la mésaventure vécue par l'avocat-stagiaire Me Youcef Benbrahim de l'ordre des avocats de Sidi Bel Abbès, suspendu (selon ledit avocat), du fait que celui-ci avait refusé de participer à un sit-in devant le tribunal de la ville, organisé par la même corporation. Non pour dénoncer les violations d'atteintes aux droits de la défense, encore moins, la situation actuelle de la profession. Mais étrangement, pour protester contre un film provocateur offensant le prophète! Une affaire très vite déviée à un litige de nature religieux, suite à la déclaration du bâtonnier de Sidi Bel Abbes, reprise par la presse nationale: 

"… un sit-in a été organisé comme preuve de soutien au Prophète. Tous les avocats se sont rassemblés, sauf Youcef Ben Brahim. S'il n'est pas de confession musulmane, nous rencontrons un problème, car les avocats prêtent serment sur le Coran. Et si Ben Brahim prête serment sur le Livre sacré, et qu'en réalité il n'est pas musulman, il y a une contradiction ! ". Donc cet avocat stagiaire avait lui-aussi l'obligation et la charge de prouver qu'il est musulman, pour répondre à un certain critère qui ne réside que dans la fiction ! Alors même que le sujet est censé ne pas l'être, puisque la religion de l'avocat n'a jamais été mise en cause par quelconque texte régissant la profession d'avocat depuis. 

Une fausse solution à un sérieux problème 


La liste des 300 prénoms amazighs promise par l'ex-ministre de l'intérieur, depuis plus d'un an, n'a pas pu voir le jour. Le problème perdure. Cette liste porte en soi-même l'ingrédient d'une série de contradictions, avant même sa sortie. D'abord, le principe de " la limitation " en tant que tel est contestable. Puisque l'application sur le terrain laisse à désirer plus. Pire encore, soumettre l'histoire et la culture amazighe à seulement 300 prénoms semble plus proche de l'ironie, de l'aberration que du rationnel (3). Et comme s'il fallait en rajouter, la déclaration faite par le même ex-ministre de l'intérieur lors de sa sortie à Tindouf (le 24/07/2013), ou il précise que " les prénoms berbères seront inscris en langue arabe ", pour éviter selon lui, les fautes d'orthographes ! Pose de facto une série d'anomalies. Quelle est la valeur juridique d'une décision prise par un ministre qui va à l'encontre de la loi, si ce n'est pas la non-conformité, entendu que l'article 02 du décret 81-26 relatif à la nomenclature des prénoms, stipule que : " les prénoms doivent être inscris en langue national ", ce qui est assurément le cas pour la langue tamazight (Berbère) ; du faite que cette dernière est considérée comme telle depuis l'amendement de l'article 03.bis de la constitution algérienne (la loi n°02-03): " Tamazigh est également une langue nationale ". Certes les rédacteurs de ce texte n'ont pas prévu cette situation : Une donne que les praticiens du droit ne peuvent outre passer. 

S'ajoute à cela, le devenir des prénoms berbères portant la lettre " V ", ne figurant pas dans l'alphabet arabe, tels que : " Massiva, Youva, Massilva … " n'ont tout simplement pas de place dans ce qui ressemble à un dénouement. 

Du panarabisme à l'islamisme … l'abrutisme! 

L'enchainement de l'histoire ancienne et contemporaine de l'Algérie, marquée par le passage de plusieurs civilisations et cultures. Pour se reconvertir après l'indépendance à un second passage de nature idéologique, doctrinal. Celui-ci lègue après plusieurs décennies, un héritage mitigé pour une société en quête de repères, entre " un orientalisme " rétrograde, et " une occidentalisation des valeurs ", qui ne s'exprime que dans la consommation. 

Cette réalité, pèse dans la mesure où l'appréciation de l'officier de l'état civil, ne se limite pas sur la problématique pour déterminer le concept de " l'algérianité ", mais plus largement encore, sur celui de " l'usage et la tradition ". L'article 64. Aliéna 3 du code de l'état civil cite clairement que : " Sont interdits tous les prénoms autres que ceux consacrés par l'usage ou par la tradition ", (une des exceptions soulevées aussi par la défense de l'APC), autrement dit, les deux concepts précités doivent également y avoir une interprétation, et pour la énième fois, au regard de la culture et du savoir de l'officier de l'état civil ou de la personne dont les prérogatives ont été mandatées, ceci pour se prononcer sur le devenir de ce qui est définie comme étant " identité " de la personne. 

De même, peut-on après plusieurs décennies de l'instauration du " rouleau-compresseur " de l'arabisation de l'environnement (4) parler de " l'usage ou la tradition ", dans une société de culture hétéroclite, ou les valeurs diffèrent dans la même cellule familiale? 

Néanmoins la question qui vient à l'esprit, est la suivante : Quel critère le législateur algérien a choisi pour ceux dont la responsabilité est extrêmement sensible ? A-t-il opté pour des qualifications intellectuelles, voir instructives ? Ou d'autres qualités d'une importance avérée? 

Hormis l'âge limité à 21 ans et un emploi permanant, aucun autre critère n'est requis pour l'exercice de cette fonction. Article 2 du code de l'état civil indique expressément que : " Le président de l'assemblée populaire communale peut, sous sa responsabilité, déléguer à un ou plusieurs agents communaux occupant les emplois permanents, âgés au moins de 21 ans, les fonctions qu'il exerce en tant qu'officier d'état civil, pour la réception des déclaration de naissances …, de même que pour dresser tous actes relatifs aux déclarations ci-dessus "). Quoi qu'il en soit, la réalité dépasse l'imaginaire. 

Cependant, n'aurait-il pas mieux fait de revoir cette censure qui ne dit pas son nom, " truffé de subjectivité et d'arbitraire", pour laisser sa place à la consécration et à la jouissance des libertés individuelles des citoyens ? Si la problématique du refus d'inscrire des nouveau-nés sous un prénom amazigh dégage de réflexions insensées, ceci dénote l'absence d'un projet de société, voué à la déperdition des valeurs où le sens de l'algérianité et les valeurs locales deviennent étrangères chez-soi. 

" La reconnaissance de l'identité nationale et des droits fondamentaux ", trimbalés d'une constitution à une autre, aura donc à patienter pour son application effective. 

* Avocat près la cour d'Annaba Membre du RADDH et de LADDH 

[1] Le préambule de la constitution algérienne prévoit que : " les composantes fondamentales de l'identité algérienne sont l'islam, l'arabité et l'amazighité ". 

[2] Rapporté par Muslim, dans son Sahih (authentique) page 1398,et aussi par Abû Dâwûd, At-Tirmidhî et IbnMâjah. 

[3] Voir notre contribution intitulée " Un progrès d'un gout inachevé ",parue au quotidien national d'information LIBERTE,N° 6383,du 14 Aout 2013, rubrique : contribution, page 9. 

[4] -Le décret 81/28, du 070/3/1981 relatif à l'arabisation de l'environnement. 

- La loi 91/05, du 01/01/1991 relative à la généralisation de l'utilisation de la langue arabe
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Les listes ne sont pas closes, bien-sûr. Elles concernent toutes les régions du pays. Elles sont à compléter, après enquête et vérification. Toute suggestion est bienvenue.

 

 

 

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 Sources :

J.M.DALLET, Dictionnaire Kabyle-Français, ed. SELAF, 1982

Encyclopédia Universalis

Wikipedia

Site Web MSN

Enquêtes personnelles.

 

 

Ont participé à l’élaboration de ces listes : Djamel Arezki

Mohand Ait-Ighil

Ɛmer Mezdad

 

 

 

 

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